la dépoterie
Lors d'un TD de clinique de l'entretien nous parlions de la fonction de reprise et de celle de dépôt. La fonction de dépôt du cadre, de l'entretien, du ou de la clinicienne, c'est celle qui permet d'accueillir des éléments dont le sujet se décharge, mais qui ne sont pas encore prêts à être traités. Tenter d'en faire quelque chose immédiatement pourrait même avoir un effet délétère. Mais si on leur offre un espace où être déposés, alors, plus tard, on pourra les transformer.
M'est revenu en tête mon stage en atelier thérapeutique marionnettes dans un CMP, il y a plusieurs années maintenant. Cette phrase d'un enfant dans un moment de grande agitation où nous – les encadrantes – étions complètement débordées par le trop-plein de paroles, de gestes : "C'est la dépoterie !" J'ai souvent repensé à ce joli mot-valise. Dépotoir, là où l'on déverse la fange et poterie, l'objet modelé à partir de simple terre. Peut-être une manière de nous dire que s'ils nous ensevelissaient de cris maintenant, c'était pour que nous les aidions à en faire quelque chose plus tard ? C'est ce que nous avons essayé de faire. Plutôt recyclage que pollution.
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La raison pour laquelle les enfants aiment les camions-poubelles.
"Garbage-truck enthusiasts are common enough that he considers “making kids happy” to be part of the job, he said, but he’d never take their enthusiasm for granted. “We have kids on almost every route. Moms hold babies at the door, toddlers wait at the window and sometimes a whole family will come out to watch and wave,” Vesi wrote to me in an email. “It makes you feel like a rock star.”"
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L'excellent compte des archives de la RTS a rediffusé il y a quelques mois l'interview d'un jeune éboueur datant de 89. L'extrait a eu tellement de succès – comment résister à cette coupe mulet ? – qu'ils ont retrouvé Samy de nos jours, toujours aussi touchant et tout étonné de son quart d'heure de gloire sur internet. Il ne peut plus travailler pour des raisons de santé mais promène son chien armé d'une pince de préhension pour ramasser les déchets qu'il voit sur son chemin.
"Ce qui est pas naturel c'est ce que je t'ai montré avant, la macdonalderie à 2 mètres de la poubelle, ça non c'est pas normal […] Bien sûr que ça fait partie du climat. D'ailleurs c'est la base, ça commence par ça. Ça commence par prendre le papier que t'as dans la poche et le mettre dans une corbeille à papier. C'est la base."
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Depuis plus d'un an il semblerait que nous soyons entrés dans une période de greenwashing (ou écoblanchiment) effréné. Toutes les entreprises, même les plus gigantesques, même celles qui tirent leur pouvoir de l'exploitation de ressources fossiles, y vont de leur couplet vaguement écologique avec images de bourgeons et packaging vert. Elles cherchent à nous convaincre que le capitalisme et la consommation de leur produits est vertueuse, respectueuse de l'environnement, éminemment morale. C'est notamment le cas d'Exxon qui a monté un petit spot publicitaire qu'elle fait insérer dans les articles à son sujet, alors qu'à lieu aux États-Unis une investigation concernant le fait que l'industrie pétrolière connaissait dès les années 70 les effets de l'exploitation des ressources fossiles sur le climat et qu'ils ont sciemment dissimulés ces connaissances. C'est aussi le cas de toutes ces start-ups qui veulent nous faire croire qu'on "sauvera la planète" en utilisant des cotons-tiges en silicone pour réduire nos déchets. Mais si les micro-gestes à l'échelle individuelle sont indispensables pour imaginer vivre autrement, ils ne sont pas suffisants pour le faire effectivement. Pour cela, il faut un effort collectif vers une transformation de nos systèmes, par exemple pour que le zéro déchet ne soit pas une lubie de ménagère mais un principe de gestion des déchets dans les municipalités.